30 octobre 2009

Le Capitalisme est incoutournable

Je me permets de retranscrire une opinion très pertinente émise par Jean-Jacques Lambin, Professeur émérite à l'Université Catholique de Louvain et Professore Università degli studi di Milano-Bicocca, et publiée dans La Libre Belgique du 30 Octobre 2009.


Dans une économie mondialisée, on ne quitte pas le capitalisme comme on quitte un parti politique ou un club sportif.

La crise économique et financière a déclenché une avalanche d’articles annonçant la fin du système capitaliste, revendiquant pour la France, voire pour l’Europe, la sortie du capitalisme et rendant celui-ci responsable du marasme économique et financier, de la destruction de l’environnement et du matérialisme de la société de consommation. Comme si, dans une économie mondialisée, on pouvait quitter le capitalisme comme on quitte un parti politique ou un club sportif. Paradoxalement, certains disent vouloir quitter le capitalisme, mais conserver l’économie de marché, alors que celle-ci est l’environnement naturel du capitalisme.

La confusion sous-jacente de ces propositions de sortie de crise rend pour le moins perplexe. Quitter le capitalisme impliquerait l’abolition de la propriété privée des moyens de production et la collectivisation des profits, et cela au moment où l’on compte beaucoup sur l’innovation, sur l’entrepreneuriat et sur les entreprises pour relancer l’économie. Proposition suicidaire et vouée à l’échec dans une économie planétaire, d’autant plus qu’en Europe, il n’y a pas d’accord politique sur ce thème. Seul le parti d’Olivier Besancenot en France soutient explicitement cet objectif. Sortir du système capitaliste dans une économie mondialisée, c’est un peu comme vouloir échapper à la loi de la gravitation terrestre.

Les valeurs morales et intellectuelles du système capitaliste s’appuient sur le libéralisme qui affirme la primauté des principes de liberté et de responsabilité individuelle et qui repose sur l’idée que chaque être humain possède ces droits fondamentaux qu’aucun pouvoir ne peut violer. Cette idéologie est largement partagée dans le monde aujourd’hui, y compris dans les partis socialistes à la Belge, à la Française ou à l’Espagnole. Il faut rappeler que les théoriciens du libéralisme (y compris Adam Smith) considèrent que l’action de l’Etat est nécessaire à la protection des libertés individuelles et à la régulation de l’économie. Economie de marché et régulation du marché ne sont donc pas incompatibles.

Aujourd’hui, presque tous les marchés sont planétaires, y compris ceux qui paraissaient les plus enracinés dans des traditions nationales alors qu’à l’échelle de la planète, il n’existe aucun droit planétaire régulant l’économie. De ce fait, les plages de non-droit se multiplient. Là où le marché ne s’autorégule pas et génère des conséquences négatives, comme les inégalités sociales, les déséquilibres du marché financier ou la pollution, il incombe aux Etats-nations et à la communauté internationale d’agir.

Peut-on assainir le système capitaliste ? Plusieurs évolutions positives permettent de le penser, comme la prise en compte par les citoyens de l’impact écologique de leur consommation et la prise de conscience par les entreprises de leur responsabilité sociale. D’une manière plus fondamentale, il faut mettre en place et/ou renforcer l’Etat de droit gouvernant le fonctionnement du système capitaliste, là où l’autorégulation fait défaut. Mission difficile s’il en est. Mais pourquoi ne réussirait-on pas à organiser une gouvernance planétaire des marchés financiers aussi efficace que celles mises en place dans d’autres domaines, tels que l’Organisation de l’aviation civile internationale, les protocoles de Kyoto pour le réchauffement climatique, l’Agence internationale pour les réfugiés, sans parler des domaines mondialisés plus étroits tels que le football mondial, le tennis professionnel ou la Formule 1 ?

C’est manifestement dans cette direction que vont les décisions du sommet de Pittsburgh qui s’est achevé le 25 septembre dernier. Compte tenu de sa capacité d’adaptation, il est vraisemblable que le système capitaliste sortira consolidé de cette régulation, d’autant plus qu’aucune alternative crédible n’apparaît.


voilà un peu de matière pour relancer notre blog, Cher Jules-de-chez-Smith-en-face