31 octobre 2006

Via Camberezina

Monsieur José Bové, pourrait-il être candidat à l'élection présidentielle française de 2007? Notre héros du Larzac nous en donnait les explications lors de l'émission hebdomadaire de Christine Ockrent, France Europe Express, le 22 octobre 2006.
Selon lui, peut-être, si une union de l'extrême gauche alter mondialiste, antilibérale anticapitaliste est possible, et que ce mouvement enfin unifié pour le progrès des peuples le désigne comme candidat. Cela est bien entendu peu probable dans un contexte où le Parti communiste français a déjà désigné la très moderne Marie-George Buffet comme possible candidat et négocie en cachette avec le Parti Socialiste, que Arlette Laguiller fera de toute façon bande à part,... Il ne reste plus que la LCR, mais je vois mal un Besancenot s'effacer pour notre ami rempli de convictions qui ressemblent plus à des certitudes. Il a la certitude que cette union aura lieu quoi qu'il arrive, et qu'elle atteindra le second tour et même la présidence... Parce que, selon lui, les « collectifs » (terme assez vague, et qu'il n'a jamais approfondi durant le débat) avec lesquels il travaille représentent une multitude (en chiffres, cela représente?) et une dynamique désirant un changement radical. Il nous donne l'exemple de la mobilisation de ces (ses ?) collectifs lors du referundum sur la constitution européenne, où le « non » l'avait emporté...(no comment). Je ne m'attarderais pas sur les autres interlocuteurs présents à ce débat, lors duquel les deux politologues, le représentant du Parti Socialiste et la députée verte italienne semblaient subir les vérités et les contradictions des « autres », dont l'un se revendiquait quand même non-stalinien. Avec des gens tellement aveuglés par leurs visions d'arrière garde, le débat, bien que correctement encadré, ressemblait parfois à une cour de récréation.

Mais revenons sur le personnage principal. José Bové (qui se prénomme en fait Joseph, comme Bill Clinton et Tony Blair se prénomment en fait William et Antony-le populisme est l'affaire de tous) est aussi le porte parole de « Via Campesina », un mouvement paysan international qui, si j'ai bien compris, prône la « souveraineté alimentaire » (le site de Via campesina n'explique absolument pas ce que c'est, wikipédia donne une brève explication ) et qui s'oppose bien entendu à l'OMC (le Grand Satan), au FMI (Les méchants usuriers), et surtout aux accords de libre-échange (c'est un gros mot ça). A part ça, le site ne nous montre que leurs actions de contestation, et les objectifs exacts sont difficilement identifiables. C'est vrai que c'est quand même plus rigolo de sillonner la planète chaussé de tongues en hurlant que d'écrire une thèse de doctorat. Nous voyons donc Joseph Bové parcourir le monde de Seattle à Davos, en aboyant «à mort l'OMC », et cela bien entendu encerclé de caméras. Cela est assez interpellant de la part d'un homme qui s'est fait connaître par la défense des petits paysans français menacés par une horrible base militaire dans le Larzac.

Je suis bien sûr d'accord avec certaines choses dénoncées par via campesina. Par exemple, je réprouve totalement la semence « terminator » de Monsanto et bien entendu, il est louable de vouloir plus de justice sociale pour les agriculteurs des pays en voie de développement. De plus une plus grande ouverture de nos marchés aux produits des pays du sud serait certainement plus juste et profitable pour tous.

Mais alors comment veut-il concilier les besoins des agriculteurs français et ceux des agriculteurs du monde en voie de développement. Parce que c'est très bien la « souveraineté alimentaire » ; chacun produit pour ses besoins et on ne fait surtout pas d'échange. Je rappelle que des gens comme Le Pen ou de Villiers utilisent aussi énormément le mot « souveraineté » et aiment aussi beaucoup le principe du chacun chez soi. Mais attention l'extrême gauche c'est le BIEN sur terre, l'extrême droite le MAL, il n'y a pas de comparaison possible. En gros on fait une grande révolution agraire en confisquant et redistribuant les terres, ce qui ne fini jamais en copinage complet et en berezina cfr. les réformes agraires du démocrate Mugabe au Zimbabwe.

Cela sera peut être très bien pour certains producteurs de pays en voie de développement qui ne se verraient pas concurrencer sur leur propre marché par les produits agricoles européens qui y sont bradés. Mais à part ça, je pense que cela poserait des problèmes à beaucoup d'autres et premièrement aux producteurs des pays avec lesquels l'UE (Belzébuth) a des accords privilégiés, tels que les pays ACP. Enfin qu'adviendra-il de l'agriculture européenne dans ce nouveau monde agricole révolutionnaire ???? Sans débouchés extérieurs, on peut aisément penser qu'une partie du monde agricole européen disparaîtra. Nos paysans du Larzac qui avaient adulé ce cher Joseph ne se sentiraient même pas trahi au profit des paysans d'Amérique du Sud.

Je vous proposerais donc, Monsieur Bové, qui n'avez pas vraiment votre place en tant que président de la République, d'aller plutôt demander à Messieurs Castro, Chavez ou Morales de devenir leur ministre de l'agriculture, qu'on rigole et qu'on appelle immédiatement le PAM. Pendant ce temps nous organiserons dans le cadre de l'OMC nos propres accords de libre-échange, loin de vos simagrés.
(à suivre...)